La bambouseraie d'Anduze, un paradis végétal exotique > photos de ma visite 2008

Enclave exotique et ombragée au coeur des Cévennes, la bambouseraie de Prafrance à Anduze (Gard) mérite à elle seule le déplacement. Elle offre au visiteur sur une surface de 12 hectares un véritable paradis végétal. La forêt compte 200 espèces de bambous qui se parent de toutes les nuances du vert et du jaune. Ce parc est sillonné par de nombreux sentiers et par 5 kilomètres de canaux qui, alimentés par un petit barrage édifié sur le Gardon, ajoutent leur murmure rafraîchissant au charme des lieux. Ici tout est de bambou, des tuyaux d'irrigation jusqu'à la clôture autour du bassin où ondoient les reflets diaprés des carpes du Japon.

Au fil de la promenade, les curieux découvrent les innombrables usages du précieux bois. Il fournit, du sol au plafond, l'unique matériau de la maison laotienne sur pilotis qu'on peut voir sur place ou de la demeure hmong, en forme de carapace de tortue, capable de résister aux pires intempéries. La tige qui plie et ne rompt pas est employée en Asie pour les échafaudages, car sa résistance mécanique est comparable à celle de l'acier. Le bambou sert aussi à produire les objets usuels les plus divers : chapeaux, paniers, boîtes, flûtes, vêtements en vente dans la boutique. Comme le savent les amateurs de cuisine asiatique, certaines variétés sont comestibles. Enfin des artistes contemporains ont fait la preuve dans le parc de ses qualités esthétiques, comme en témoigne notamment le vaste dôme à ciel ouvert édifié par le sculpteur Tieri Lancereau-Monthubert.

On s'en doute, ces bambous ne sont pas autochtones, ils ont été importés en 1856 par Eugène Mazel, grand voyageur et marchand d'épices, issu d'une famille protestante cévenole. Il avait remarqué les propriétés favorables du sol constitué d'alluvions fertiles et du microclimat tropical du vallon. Le bambou n'est d'ailleurs pas le seul occupant des lieux, le fondateur lui avait adjoint d'autres espèces : séquoias, palmiers de Chine, érables du Japon, magnolias...

JARDIN BOUDDHISTE

Eugène Mazel a fait faillite en 1890 après la maladie qui a mis fin à l'élevage du ver à soie dans la région. Le domaine fut vendu aux enchères. "Mon beau-père, Gaston Nègre, a eu la chance d'enchérir juste avant l'extinction de la bougie", raconte Janine Galzin-Nègre, qui prit la suite de l'exploitation en 1948 avec son mari, Maurice, ingénieur agronome. Malgré les crues dévastatrices de 1958 et de 2002, dont les hauteurs impressionnantes sont inscrites sur le mur de la ferme, la bambouseraie est restée une entreprise familiale. La fille de Mme Nègre, Muriel, en assure la direction, et l'un de ses enfants, Simon Crouzet, gère la pépinière.

A l'occasion du 150e anniversaire de la bambouseraie, le paysagiste Eric Borja a aménagé le vallon du Dragon, un jardin bouddhiste inondé de soleil où il a planté 70 000 bambous nains qui tapissent de leur gazon vigoureux les rives d'un petit ruisseau. Un pavillon japonais a été construit en bois de châtaignier selon des techniques d'assemblage tant orientales qu'occidentales par Roger Ménétrier, artiste forestier et charpentier cévenol.

Le soir venu, les mystérieux bosquets s'illuminent sous les rayons dorés du soleil couchant qui éclairent en un contre-jour féerique les hautes hampes des bambous et les dentelles délicates des fougères.